L’hôpital
Centre Ancien
Après avoir emprunté cette partie étroite de la route de Lespignan, devant le « château », nous sommes arrivés sur ce carrefour qui joint la route de Lespignan, la rue de la Cave, la rue de l’Eglise et l’avenue de la Gare. La maison qui se trouve au coin de l’avenue de la Cave et de l’avenue de la gare occupe l’emplacement de l’ancien hôpital de Nissan.
Ce bâtiment était constitué de la maison de l’hôpital proprement dite et d’une écurie adjacente, dont on voit l’ouverture à gauche dans l’avenue de la Gare. En 1691, l’hôpital possédait également un champ et des olivettes. On retrouve ces biens, vendus à un certain Guy comme biens nationaux à la Révolution. L’écurie s’est alors transformée en étable.
L’institution était importante et jouait un rôle d’accueil pour les pauvres malades, les enfants abandonnés, les soldats blessés, les étrangers en situation difficile et plus ordinairement tous les délaissés. L’hôpital justifiait la présence dans le village d’un ou deux chirurgiens et, à certaines époques, d’un médecin et même d’un apothicaire.
La date de fondation de l’hôpital de Nissan n’est pas connue. Il est attesté dans les archives communales à partir de 1619. On parle alors d’un bureau de l’hôpital dirigé par les consuls qui nomment chaque année un recteur qui prendra par la suite le nom de procureur. Ce procureur fait partie des officiers municipaux. Ce bureau est constitué d’un maître chirurgien, d’une religieuse « hospitalière », d’un trésorier et d’un « gardien des pauvres », chargé entre autres du transport des malades.
On sait qu’il existait d’autres hôpitaux dans la région, à Coursan pour le plus proche, puis à Narbonne, Béziers et Perpignan.
L’existence de l’hôpital justifie la présence à Nissan de plusieurs chirurgiens ou maîtres chirurgiens. Nous connaissons les noms de certains d’entre eux et nous savons qu’ils résidaient à Nissan. Un médecin et un apothicaire sont également mentionnés au cours du XVIIIe siècle.
La profession de chirurgien a mis du temps à s’individualiser. Elle se sépare des barbiers par la création du collège de Saint Côme en 1379. En 1656 les deux corps de barbiers et de chirurgiens sont à nouveau fusionnés. C’est la déclaration royale du 23 avril 1743 qui va réaliser la séparation définitive et règlementer la profession qui se rapproche, dès lors, de la profession de médecin.
On soignait à l’hôpital toutes les personnes qui ne pouvaient pas être soignées chez elles, essentiellement les étrangers de passage et les pauvres de la commune. On note parmi les étrangers, des gens en voyage, des soldats blessés venant du Roussillon voisin en guerre. Parmi ces gens qui sont sur les routes, des femmes enceintes y accouchent. On y recueille également les enfants trouvés dont certains y vivent, nourris par la charité publique. Lorsqu’ils ne sont pas abandonnés, c’est un lieu discret pour l’accouchement des bâtards.
Les procureurs de l’hôpital sont sollicités lorsque l’un de ces enfants abandonnés est trouvé dans le village. La porte de l’hôpital est l’un des lieux d’abandon. C’est aussi le cas de l’église mais aussi du cimetière (!), voire de la maison d’un consul. Les enfants recueillis ou nés à l’hôpital sont baptisés et leurs parrains et marraines sont le plus souvent les consuls et leurs épouses.
Ces naissances nous permettent de dire un mot des sages-femmes, presque toujours présentes lors des accouchements à partir de la fin du XVIIe siècle. Passant du statut de matrones assez mal considérées, elles vont acquérir une notoriété qui va les rendre rapidement indispensables. Portée au premier plan par Louise Bourgeois, accoucheuse de Marie de Médicis, femme de Martin Boursier, maître chirurgien, la profession sera règlementée par Louis XIV qui rend obligatoire la présence d’une sage-femme dans chaque communauté.
On dispose d’un document important, le 6 juin 1640, qui décrit la réception, à Nissan, d’une sage femme, Marguerite Virottes. Contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, ce ne sont pas les chirurgiens qui la reçoivent mais, sur présentation des consuls, le vicaire de la paroisse.
En 1742, faute de moyens, l’hôpital est confié à la confrérie de la Charité. Le suivi médical est alors assuré par un médecin nommé chaque année. Après la révolution, l’institution sera transformée en Bureau de Bienfaisance de la Municipalité.
Vous pouvez, désormais, en remontant la rue de l’église, l’une des plus anciennes rues pavées du village (processions obligent), vous diriger vers l’église Saint Saturnin, monument historique du XIVe siècle, ou revenir sur l’avenue de Lespignan vers l’est en direction de l’école de garçons.